Le Jardin noir-1966

 
 
Titre original   Le Jardin noir

 



© Julliard
  Titre Le Jardin noir
Editeur Julliard
Lieu d'édition Paris, France
Année de l'édition 1966
Année du copyright 1966 (Julliard)
Langue Français
Genre Roman
Remarque Prix des Quatre-Jurys
 
 
 
 

Présentation du livre par l'éditeur

Deauville,un matin d'hiver. Un homme se promène, solitaire, dans le vent glacial. La villa familiale va être démolie; il a voulu la revoir encore. A-t-il souri, simplement ému par la rencontre d'un autre être humain, en apercevant une femme, seule elle aussi, sur les planches ? " Alors, s'exclame-t-elle, on ne tient plus ses engagements ? Il était convenu qu'on me laisserait sans surveillance?· " Ainsi commence le plus beau, le plus émouvant,le plus actuel des romans. Qui est cette femme ? Une Allemande, fille d'un tortionnaire des camps de la mort. Un drame est noué autour d'elle. D'un côté, le poids (mais elle en est innocente, elle avait treize ans) d'un des plus grands péchés du monde et, de l'autre, l'esprit justicier des fils des martyrs. Le récit, tout de suite, se fait haletant, fiévreux, et la tension croît d'une page à l'autre. Celle qui vit (et mourra peut-être) dans le jardin noir de la solitude et de la haine, hantera désormais le solitaire de Deauville. Ils avaient l'un et l'autre si soif de tendresse humaine?
© Julliard et Christine Arnothy

Extrait du livre

Chapitre 1

- Alors, continua-t-elle, vindicative. On ne tient plus ses engagements,on perd son sang-froid, on s'emballe ?

- Vous me confondez avec quelqu'un fit Yves. N'empêche que je préfère être pris pour un autre et injurié plutôt que rester seul.

- Il était convenu qu'on me laisserait aller à Cherbourg sans surveillance.L'enjeu est assez considérable· Vous auriez pu au moins me laisser une impression de liberté. En tout cas, personne au monde ne pouvait prévoir que, me dirigeant vers Cherbourg, j'allais changer de train à Lisieux. Moi-même, je ne le savais pas.

Yves grelottait.Il revint vers la route qui longeait les cabines. Protégé par celles-ci, il reprit son souffle. La femme s'approcha de lui. Elle devait avoir froid dans son vieil imperméable. Un foulard vert retenait ses cheveux qu'Yves supposait châtains. Elle n'était pas grande. La ceinture en tissu imperméable, sauvagement serrée,entourait une taille fine.

Il se retourna vers elle :

- Vous êtes hollandaise ou belge ?

Les yeux de la femme prirent un éclat métallique.

- Vous voulez recommencer de A à Z, ici, emporté par le vent, en prenant ces grues pour témoins ?

Elle désigna du doigt des grues jaunes qui arrachaient et revomissaient la terre en promenant avec nonchalance leur charge dans l'air.

- Ici, il y aura une piscine, expliqua Yves. On dit qu'elle sera même terminée pour l'été. Regardez, cria-t-il dans le bruit du chantier : derrière, vers la gauche, la grande maison avec ses volets verts, c'est ma maison. Vous voulez la voir? Il reste très peu de temps pour l'admirer : elle sera démolie lundi prochain.

- Depuis quand l'Organisation utilise-t-elle des apprentis comme vous ? Vous croyez que je vais vous suivre dans votre maison-fantôme ? J'ai toujours eu, jusqu'ici, la crème de votre équipe, les plus raffinés, les plus intelligents· Et c'est un amateur qui m'accoste à Deauville !

Yves en eut assez. Il releva le col de son manteau autour du cou et s'apprêta à reprendre la direction du Normandy.


- Au revoir, mademoiselle. Je ne savais pas qu'un second moi-même se promenait dans la nature. Je n'aime pas être le sosie d'un inconnu. Au revoir.

Gardant son fourre-tout à la main, elle le suivit.

- Si vous n'étiez pas de l'Organisation·

- Je suis adjoint à la Sauvegarde des monuments historiques, mademoiselle. Au moins, j'aurais aimé savoir si vous étiez belge,ou hollandaise, ou suédoise peut-être·

- Je suis allemande.

Essoufflés,ils s'arrêtèrent. La violence du vent les faisait s'abriter contre les cabines. Dans cette tempête blanche, l'Allemande semblait inoffensive et hésitante. Yves la prit par le bras.

© Julliard et Christine Arnothy

Extraits de presse

Le Figaro littéraire, Maurice Chapelan

" Mme Christine Arnothy est une romancière qui a un sens remarquable du suspense mis au service d'un tragique, et l'on pourrait presque dire d'un fantastique social, qui est à l'image des plaies les plus profondes et les plus honteuses de notre temps. "

Le Républicain du Centre, René Palmiery

" Entrée dans les lettres en 1954 par les voies de l'autobiographie, avec un livre bouleversant : J'ai quinze ans et je ne veux pas mourir, Christine Arnothy publie, avec Le Jardin noir,son sixième roman, et confirme, dans cette oeuvre d'imagination et de psychologie, la maîtrise, la vigueur et la subtilité de son talent. "

Elle

" (?) c'est le plus profond, le plus terrible, des romans signés Christine Arnothy. "

La Libre Belgique, S. d. V.

" Roman extraordinaire où l'histoire et la " magie "se confrontent, où tout est vérité, violence,haine, amour, pudeur. Peut-être l'oeuvre maîtresse de Christine Arnothy. "

Commentaires de l'auteur

Je me suis demandé si la culpabilité pouvait être héréditaire. Dans Le Jardin noir, la fille d?un tortionnaire nazi est malade des crimes de son père.

Son
errance et ses souffrances symbolisent le drame allemand : même innocente, Sigrid porte tout le poids du monde à cause de son père.

Le brave Français qui liquide la maison familiale à Deauville et se perd dans la contemplation de ses livres de jeunesse représente une société française fermée et restée volontairement en dehors des problèmes mondiaux.



Fait remarquable : les Allemands ont publié ce livre (Romanze in Deauville, éditions Blanvalet), et c?est tout à leur honneur.

© Christine Arnothy
©Christine Arnothy