L'Homme aux yeux de diamant-2006

 
 
Titre original
  L'Homme aux yeux de diamant


© Fayard
  Titre L'Homme aux yeux de diamant
Éditeur Fayard
Lieu d'édition Paris
Année de l'édition 2006
Année du copyright 2006 (Fayard)
Langue Français
Genre Roman
 
 
 

 

Présentation du livre par l'éditeur

L'histoire de L'Homme aux yeux de diamant se déroule entre l’Europe et les USA, dans le milieu des diamantaires et celui des commanditaires de crimes souterrains. Elisabeth Clark fut l’héroïne des trois romans à succès de Christine Arnothy parus sous le nom de William Dickinson dans la collection « Spécial Suspense » d'Albin Michel. « Sous ce pseudonyme, je me sentais plus libre d'écrire une aventure plus anglo-saxonne que française, avec à l’arrière-plan New York et Las Vegas », explique Christine Arnothy.
 
Elle n’a jamais été aussi proche de son roman à grand succès Vent africain qu’avec ce roman inédit, où elle raconte l’existence passionnante d’un marchand de pierres précieuses qui risque jusqu’à sa vie pour acquérir les « Yeux », deux diamants de cinquante carats chargés de légendes. Souvent le sang couleur rubis coule, les intrigues se nouent et créent une tension incessante. Et les crimes, même les plus sophistiqués, ne sont jamais parfaits…
 
Cette aventure littéraire révèle l’extrême diversité du talent de Christine Arnothy. Ses personnages sont tous des victimes et des héros d’un double et éternel fantasme : l’argent et le pouvoir.
© Fayard et Christine Arnothy

 

Extrait du livre

Chapitre 1

L'homme assis derrière son bureau en acajou était aux aguets. Il venait d'entendre de légers bruits de pas, on circulait dans la demeure patricienne. À sons fins et aigus, la pendule venait de marquer l'heure. Il regarda la petite aiguille arrêtée sur le XI.
 
Son bureau était au deuxième étage. Dans la cage d'escalier cossue se répercutaient des pas. Berthold Helenbrandt décrocha le combiné pour appeler sa femme, mais, de crainte qu'elle lui reproche d'être obsédé par le danger, il renonça. Il quitta son fauteuil, regarda au-dehors entre deux lamelles de store, vit le réverbère d'en face : la rue était déserte. Il tendit l'oreille ; il ne se trompait pas, quelqu'un devait descendre du premier étage au rez-de-chaussée. Un voleur, peut-être, qui aurait découvert que, côté cuisine et cour, la porte n'était pas sécurisée. La femme de ménage avait dû oublier d'activer le système d'alarme. Que pouvait chercher l'intrus ? Un chandelier de sa collection ? Ou n'était-ce qu'un repérage ? « Mais, pensa-t-il, je ne fais peut-être qu'imaginer cette présence. » Parfois, dans la maison, les meubles craquaient sans qu'on les touche. Les marches se rebellaient aussi à l'arrivée de la chaleur de l'été.
 
Il décida de sortir dans le large couloir, d'allumer les lumières et de vérifier l'origine de ce supposé va-et-vient. Sa femme avait sa chambre au premier. Il n'allait pas frapper à sa porte : il risquerait de susciter une crise d'hystérie. Elle ne dormait qu'à l'aide de puissants somnifères et un réveil brutal la transformait en fauve.
 
Il passa à côté de la haute et élégante pendule, une comtoise dont le balancier doré, isolé par une étroite ouverture vitrée, se déplaçait au rythme du temps. Berthold leva la tête et regarda le cadran. Depuis des années il se sentait coupable, condamné à une mort brutale. Un Tchèque clandestin lui avait proposé un jour un saphir dérobé dans la plus vieille synagogue d'Europe, l'Altneu de Prague. Il avait expliqué l'avoir trouvé à l'époque où la synagogue avait été démolie. L'homme tenait le saphir dans le creux de sa main. Déballé d'un mouchoir. Helenbrandt était bouleversé. La fascination de la pierre le mettait dans un état second, et l'idée que ce joyau pût être réduit à l'état de vulgaire marchandise le rendait fou. Il l'avait acheté en se promettant de le rendre un jour à l'Altneu. Il avait caché le saphir – en hébreu, sappir – dans les entrailles de l'horloge en face de lui, et avait fait électrifier le mouvement. Cette pendule, on ne la remontait pas, elle subsistait comme un être humain sous assistance respiratoire. Le sappir partait à droite, à gauche, incrusté dans le disque doré – les spécialistes l'appellent « lentille », pour Helenbrandt c'était un petit soleil. Il ne vivait en paix avec son joyau qu'en étant convaincu qu'il respectait un objet sacré.
 
Il sortit dans le couloir et se pencha sur la balustrade qui surplombait le hall. Même de là, il sentit le parfum de Francesca. Il saisit la rampe, descendit au premier étage et se tourna vers la chambre de sa femme. Ayant besoin de sa présence, il se sentait diminué, humilié. Il crut entendre des sons saccadés, presque de petits cris espacés. Sa femme ne serait pas seule ? Aurait-elle un amant ? Aurait-elle osé l'introduire dans la maison ? Le parfum lancinant de Francesca imprégnait le large couloir. Toujours le même : Mandala. « Des litres », pensa Berthold. Une fortune dépensée pour cette odeur qui revêtait, ce soir-là, une nuance olfactive de plus. « Mandala plus naphtaline », songea-t-il avec ironie. Il fut troublé et se rappela l'organisation d'un spectacle à caractère sexuel, après leur premier dîner sous ce toit.
 
Depuis l'adolescence, Berthold était un voyeur. Il avait rencontré Francesca dans une boîte de nuit de la capitale belge. Née aux USA, fille d'immigrés italiens, elle était parée de l'aura de l'Amérique. Après des échecs successifs sur le plan artistique, elle était revenue en Europe avec un industriel italien qui l'avait abandonnée en lui laissant une somme honorable en guise de cadeau de rupture. Le jour de son excursion dans la vie nocturne, poussé par une envie de musique et de mouvement, Berthold était parti passer la soirée au Rumba, boîte connue du côté wallon. En quête d'un client riche, ou du moins correct, Francesca avait repéré le joaillier, à la recherche d'une femme pour la soirée. De trente-cinq ans plus jeune que lui, elle lui avait fait passer une nuit mémorable. Elle l'avait fait assister aux ébats de plusieurs couples, puis lui avait procuré un plaisir extrême. Elle se vantait de ses conquêtes et de ses longues jambes, parlait de Las Vegas. Pourquoi était-elle seule et ici ? Son ami italien était mort dans un accident d'hélicoptère. « Ça peut même être vrai », avait pensé Berthold.
 
Pendant leur liaison, elle avait dû souvent relancer Berthold qui s'échappait, puis elle avait réussi à l'épouser. Leur contrat de mariage était sévère. « Même leurs souffles sont en séparation de biens », avait déclaré le notaire après les signatures, satisfait d'avoir enfin affaire à un client intelligent. Pour Helenbrandt, Francesca était le rêve d'un vieillard qui ne veut pas mourir seul dans une chambre d'hôpital. Elle serait douce et présente, espérant une part d'héritage.
 
Anvers avait accueilli Francesca avec une certaine curiosité, ensuite la société locale s'était mise à l'ignorer. Amère, Mme Helenbrandt avait bientôt compris qu'il ne suffisait pas d'épouser un homme riche pour avoir de l'argent. Ils vivaient côte à côte, elle devait inscrire ses dépenses dans un cahier que son mari vérifiait chaque mois. Elle était dégoûtée des hommes : elle s'était donné tant de mal pour les dominer, elle avait été toujours trahie ! (…)
© Fayard et Christine Arnothy

 

Extraits de presse

Le Nouvel Observateur, 22 juin 2006, Claire Julliard « Une plongée redoutable dans les eaux troubles d'un monde où les diamants valent plus cher que les hommes. »

Le Point, 6 juillet 2006, Anne Ferrand « (…) l'auteur révèle un talent indéniable et acharné pour les histoires affreuses. »

Gazette du Palais, 25-26 octobre 2006, René Vigo « Intrépide, obstinée, malicieuse, Christine Arnothy crée, comme en se jouant, des situations diaboliques avec coups de théâtre. Le lecteur, conquis, est constamment en haleine, dans une incessante tension, par la magie d'une romancière d'exception (…). »

© Christine Arnothy